Comité Social Territorial du 28 mars 2025
Intervention sur le rapport d’activité 2024 & sur la mise à jour du guide de déontologie
Rapport d’activité 2024 du référent Laïcité : défendre les libertés, former sans contraindre
Lors de la présentation du rapport annuel 2024 du référent laïcité, nous avons souhaité réaffirmer, au nom des élu·es CGT, notre vision d’une laïcité garante des libertés individuelles, et non un outil de restriction ou d’exclusion.
Nous avions déjà eu l’occasion de nous exprimer sur ce sujet lors d’un précédent bilan. Nous n’y reviendrons pas dans le détail, mais tenons à rappeler une conviction forte : face à la xénophobie et au racisme, la CGT continue de défendre une laïcité de tolérance et de fraternité, une laïcité qui protège au lieu de contraindre.
Nous portons une conception de la neutralité de l’agent public compatible avec ses libertés. Oui, un agent public est tenu à une neutralité dans le cadre de son service. Mais cela ne peut en aucun cas signifier qu’il ou elle doive renoncer à ses convictions personnelles ou être privé·e de sa liberté d’opinion en dehors de ses fonctions. Chacun·e reste libre d’adhérer à la spiritualité de son choix, et cela ne doit jamais nuire à sa carrière.
Une formation utile et bien accueillie
Concernant le rapport 2024 du référent laïcité, nous saluons la hausse des ambitions en matière de formation. Elle a été généralisée, et les retours que nous avons eus de la part des agents sont globalement positifs. Avec 1834 agents formés sur l’année, soit plus de 80 % des effectifs, les résultats sont là.
Plusieurs d’entre nous ont participé à la formation dispensée par l’établissement, et nous pouvons témoigner qu’elle est parfaitement compatible avec la conception de la laïcité que nous défendons à la CGT. Mieux encore, ce fut un temps d’échange précieux, permettant de s’instruire, de prendre du recul, et de sortir des caricatures souvent véhiculées dans les discours publics.
Des saisines en hausse, mais pas d’alerte
Enfin, le rapport relève un doublement des saisines entre 2023 et 2024. Pour autant, celles-ci restent majoritairement de l’ordre de l’accompagnement, et non de la sanction. Le rapport le note : ce chiffre « reste contenu », signe que l’application du principe de laïcité à la MEL ne pose pas de problème majeur.
C’est également ce que nous constatons chaque jour dans les services. Et c’est tant mieux. Car défendre la laïcité, ce n’est pas brandir un interdit, c’est garantir à chacune et chacun les mêmes droits, les mêmes devoirs, dans le respect de tous.
Martin Pasero
Mise à jour du guide de déontologie applicable aux élus et agents de la MEL
La mise à jour du guide de déontologie est une initiative que nous saluons. Elle permet une lecture plus claire des textes en vigueur, recentrés autour des évolutions législatives et jurisprudentielles récentes. C’est un document utile, accessible, qui peut renforcer la connaissance des règles encadrant nos missions.
Mais à la lecture attentive de cette nouvelle version, plusieurs éléments appellent à la vigilance. Et en tant qu’élu·es CGT, nous ne pouvons rester silencieux face à certaines orientations sémantiques et omissions préoccupantes.
Responsabilité, diligence et loyauté : un vocabulaire qui en dit long
Dès le paragraphe 1.1 de la première partie, le titre, « Responsabilités, diligence et loyauté », donne le ton. Et il ne peut que nous alerter.
Car nous défendons une vision forte du statut de la fonction publique : le fonctionnaire est un citoyen, pas un sujet.
La loyauté, telle qu’énoncée ici, manque cruellement de définition. De quoi parle-t-on ? De fidélité aveugle à la hiérarchie ? D’une obligation morale déconnectée de l’intérêt général ? Pour un contractuel, un agent précaire ou un fonctionnaire soumis demain à la logique du mérite, cette notion peut vite devenir un instrument de contrôle idéologique.
Quant au terme « diligence », il étonne encore davantage. Introduit sans explication claire – et utilisé à peine deux fois dans le document – il évoque davantage les logiques de management privé que les valeurs du service public. Si l’on entend par là le soin apporté à l’exécution des missions, soit. Mais si on glisse vers une injonction à l’empressement permanent, on sort du cadre du service public pour entrer dans celui de la productivité à tout prix.
Même certains collègues d’autres organisations syndicales ont fait part de leurs doutes en amont.
Et les droits des agents, dans tout ça ?
Un autre oubli majeur du guide est le déséquilibre flagrant entre les devoirs des agents et leurs droits. Où sont les chapitres sur le droit d’expression, la protection du lanceur d’alerte, ou encore les garanties fondamentales du statut ?
Cette absence n’est pas neutre. Elle nourrit une vision unilatérale des agents publics, vus uniquement comme des exécutants tenus à une exemplarité sans contrepartie.
Or, dans le service public, les droits et les devoirs sont indissociables. L’un ne va pas sans l’autre. Et c’est justement cette articulation qui donne sens à notre engagement professionnel.
Des moyens à la hauteur de l’ambition ?
Enfin, cette présentation fut l’occasion d’aborder la question des moyens alloués à la mission de déontologie. Vous annoncez des formations internes pour mieux diffuser les règles. C’est une bonne chose, mais quelles modalités sont prévues ? Quand auront-elles lieu ? Qui les animera ? Et surtout, aurez vous les ressources suffisantes pour assurer à la fois le suivi des saisines et l’animation de ces formations ?
La question de l’externalisation des dossiers mérite également des précisions : comment s’articule-t-elle avec le suivi en interne ? Pourquoi ne pas inclure ces éléments dans le guide, tout comme les délais de traitement, qui figurent dans d’autres supports, mais sont absents ici ?
Pour un guide réellement protecteur
Ce guide a le mérite d’exister et d’évoluer. Mais pour qu’il soit un outil d’information et de protection, et non de mise au pas, il doit respecter un équilibre fondamental : celui des droits et des devoirs, des valeurs du service public et des réalités vécues par les agents.
À la CGT, nous resterons vigilants à ce que les évolutions sémantiques ne masquent pas des reculs politiques. Et nous continuerons à défendre une fonction publique fondée sur l’émancipation, pas sur la soumission.
Camille Longueval